Se lancer dans un média scolaire implique souvent de photographier, filmer ou enregistrer des élèves. Comment s’assurer que le droit à l’image est bien respecté ? Sara Byström, avocate à la cour, experte en droit de la photo, en droit d’auteur et en patrimoine culturel, fait le point sur la question.
C’est un droit qui pour l’essentiel trouve son origine dans l’article 9 du Code civil, qui dispose que « Chacun a droit au respect de sa vie privée ». L’image des personnes en fait partie. Certaines dispositions sur le respect de la dignité trouvent leur base dans le Code pénal. Ce droit est mouvant car jurisprudentiel, c’est-à-dire créé et construit par les décisions des juges dans les affaires qui leur ont été soumises. Ce droit peut donc évoluer à la suite d’une nouvelle décision. L’image de soi et tous les éléments qui composent la spécificité de chaque individu lui appartiennent : cela peut être le visage bien sûr, mais pas seulement. Cela peut être tout élément qui permet de le reconnaître (voix, tatouage, cicatrice…), condition nécessaire par ailleurs pour parler d’atteinte au droit à l’image. Pour les mineurs et les élèves, il faut attendre la majorité pour que l’individu ait pleine gestion de son droit à l’image. En attendant, ce sont les personnes qui détiennent l’autorité parentale qui peuvent signer au nom et pour le compte de leur enfant jusqu’à ses 18 ans. Il est également prudent de faire signer, quand c’est possible, les deux parents.
Pour les mineurs, le principe du droit à l’image est celui d’une autorisation écrite préalable, à la fois pour la captation de son image (la prise de vue) et son utilisation. Cela signifie qu’on est obligé de préciser ce que l’on autorise. En principe, on autorise donc à la fois la prise de vue et l’exploitation/l’utilisation de cette image. Plus le document est précis, à la fois sur la captation et sur les utilisations, mieux c’est. Par exemple, quand c’est pour un shooting particulier ou un événement, la prudence veut qu’on le décrive très précisément (nombre d’élèves, nature et nom du support, modes de diffusion, nombre d’exemplaires, temps de publication déterminé…). Plus il y a d’éléments, de précision, plus la personne aura été mise dans la situation de donner un consentement éclairé. C’est pourquoi une autorisation demandée aux parents à la rentrée, qui serait extrêmement sommaire et valable pour toute l’année, est très risquée et pourrait être incriminée devant un tribunal. Il faut avoir un maximum d’informations à toutes les étapes de la bonne gestion du droit à l’image. Pour l’utilisation numérique, on peut mettre toutes les adresses web, des liens, inviter les parents d’élèves à aller voir d’abord et signer ensuite. Si l’image est destinée aux réseaux sociaux, il faut être particulièrement attentif et prudent. Il faut bien préciser les utilisations et leurs limites, ainsi que les noms des comptes sur lesquels l’image sera diffusée. Il est important d’archiver ces autorisations et que l’identification de l’enfant et des parents y soit clairement établie, avec des coordonnées à jour, si l’autorisation devait être renouvelée ou modifiée. Le droit, ce sont des règles qu’on a convenu de respecter et qui demandent ensuite à être gérées. D’où l’importance de s’informer des projets et des détails d’utilisation, prendre son temps dans la construction de l’autorisation avant de communiquer avec les parents et élèves avec pédagogie.
Il sera prudent de prévoir une durée limitée, même longue. Si on se base sur les principes du droit, l’absence de durée équivaudrait, en principe, à une durée indéterminée et qui pourrait être rompue à tout moment. Il a déjà été jugé qu’une autorisation de droit à l’image doit être limitée dans le temps et qu’une autorisation illimitée a été considérée comme excessive. S’agissant de mineurs, les juges sont plus sévères dans leur appréciation. On peut aussi imaginer des autorisations renouvelables à la fin de la durée prévue, à moins que la personne n’exprime l’envie de ne pas la renouveler, d’où l’importance d’une bonne gestion de leur mise à jour, notamment en termes de coordonnées et données personnelles.
Propos recueillis par Sophie Gindensperger, journaliste et formatrice CLEMI