La vidéo teasing de l’année
“L’AS Tennis de table invite les professeurs", “En quoi le Grand Paris express changera-t-il nos vies?”, “La K pop va-t-elle remplacer le rap?”, “Drame au concert de Travis Scott” : de l’actu la plus proche à l’actu internationale, les journalistes du Petit Corot TV s’intéressent à tout et annoncent les sujets qu’ils vont traiter pendant l’année.
Les interviews “tac au tac”
“Guitare ou piano?”, “Rock ou rap?”, “Mozart ou Beethoven?” : voilà les questions posées à Mme Paulet, professeure de musique, au collège Camille-Corot. Une interview menée tambour battant sur une musique rythmée.
Des reportages sur le terrain
En voyage scolaire à Saint-Sorlin d’Arves (73), les jeunes reporters Yanis et Eliott racontent leur découverte du ski, des crozets et du reblochon et n’oublient pas de montrer les meilleures cascades en luge et les chutes de leur professeure.
« LES ÉLÈVES ARRIVENT PLUS FACILEMENT À DÉPASSER LEURS LIMITES »
Florent Simoncini, professeur de physique chimie au collège Camille-Corot à Chelles (77).
Comment est né “Le Petit Corot TV”?
Ça a commencé d’abord avec le club journal, qui était version papier. M. Kechaou, l’un des collègues qui encadrent le club journal, a remarqué que le format papier intéressait de moins en moins les élèves, par contre YouTube était en train de prendre beaucoup d'ampleur, et il a eu l’idée de faire le premier journal vidéo sur YouTube. Et ça a attiré les élèves, qui voient beaucoup d’influenceurs sur YouTube et qui avaient envie de tenter l'expérience. Ça a amené beaucoup de monde. Les gens regardent plus facilement une vidéo qu’un article. Cela fait maintenant 5 ans que c’est une télé.
Comment fonctionne l’atelier en ce moment? Vous vous retrouvez à quelle fréquence? Combien d’élèves participent?
On fait un recrutement en début d’année, où on présente tous les clubs du collège lors d’un petit forum. On leur présente les deux jours où on fait les activités : le mardi soir et le jeudi midi. Le jeudi midi a été complètement annulé à cause de la crise sanitaire, et de la difficulté à faire passer les élèves en priorité au self. Donc là, il ne reste que les élèves qui étaient inscrits le mardi soir. On fait une petite conférence de rédaction, la table est mise en U, on s'installe tous; généralement, quand on peut, on a un goûter, des boissons, et la rédactrice en chef, qui est une élève qu’on juge mature et investie, commence à poser des questions: sur quoi vous voulez travailler, etc. On attribue des reportages en groupe, généralement ils sont plusieurs à travailler sur un reportage. On rappelle la méthodologie, ce qu’il faut présenter, l’angle d’attaque, tout ça. Et après, ils se mettent au boulot, ils font le petit goûter, ils font leur prise de notes à l’écrit, on relit leurs écrits, on les aide à ce que ce soit plus pertinent, et après on passe à la partie vidéo, montage, ce qu’on met dans les fonds verts, ce genre de choses.
Quels sont les sujets qui reviennent le plus en conférence de rédaction? Comment se fait le choix des sujets?
Spontanément, les élèves vont avoir tendance à choisir des choses qui leur plaisent, des films qu’ils aimeraient commenter, des mangas dont ils veulent parler, éventuellement des jeux vidéo. Mais on leur dit bien entendu qu’un journal, pour qu’il soit complet, il faut plein d’autres choses, comme l’actualité nationale, internationale, un peu de culture, un peu de sport, et du coup ils vont se répartir ça naturellement et sans qu’il y ait de tension. Si ce sont des sujets un peu politiques, sensibles, on va leur dire d’éviter ce genre de choses, mais sinon on encourage à ce qu’il y ait de l’actualité générale. On s’attache aussi à ce qu’il y ait de l'actualité du collège, s’il y a des sorties, des voyages, il faut forcément que ce soit aussi traité, donc on demande à des reporters s’ils sont intéressés pour traiter ça.
Vous avez une grosse fréquence de diffusion. Pourquoi avez-vous choisi de faire plein de petites vidéos, et comment gérez-vous cette quantité?
On sort une trentaine de vidéos par an, elles arrivent souvent en bloc parce que c’est fréquent qu’ils finissent leur projet à peu près tous en même temps, avec trois ou quatre vidéos qui arrivent d’un coup. On va choisir de ne pas les publier le même jour pour que les élèves qui sont abonnés aient du contenu régulièrement.
Quel est le matériel que vous utilisez pour faire tout ça?
On utilise principalement nos téléphones portables, les élèves sont même amenés à sortir leurs téléphones pour faire des recherches de temps en temps, parce que c’est un peu plus rapide que sur nos ordinateurs, et puis tout ce qui est prise de vue ça va être avec le téléphone. Pour le matériel audio, par contre, on a des prises jack qui permettent de dédoubler le son, on a aussi un micro-cravate, et un micro Rode portatif, en perche, qui va être plus adapté en extérieur pour les grand reportages, mais on ne l’a pas encore beaucoup utilisé. On a aussi des trépieds pour stabiliser. Et puis les élèves se répartissent les rôles naturellement lors des reportages, puisqu'ils sont plusieurs, il y en a un face caméra et un autre qui fait le contrôle de l’image.
Comment avez-vous fait l'acquisition de tout ce matériel?
D’abord, il y en avait un peu de notre poche, on avait acheté quelques stabilisateurs à nous, qu’après on a ramenés quand on a pu en acheter grâce au collège. Donc on a dédié quelques fonds, et puis il y a eu des fonds informatiques du collège qui ont aussi été utilisés pour Le petit Corot TV. On a des petites enveloppes chaque année pour le matériel informatique.
Vous confiez le matériel aux élèves, quand ils partent en reportage, ils en ont la responsabilité?
Ils vont avoir, par exemple, la tablette pour faire les montages, ils vont la garder une semaine, et vont pouvoir travailler dessus le week-end. On leur dit bien de faire hyper attention. Ça se passe bien, il n'y a jamais eu de problème jusque-là. Des fois, on a un peu l'impression que c’est un peu un lingot d’or qu’ils tiennent dans les mains, ils n’y croient pas mais ils sont toujours très contents et ils y font très attention.
Qui fait le montage de ces reportages?
Il y a quelques élèves qui font les montages, sinon au début c’était principalement nous. Progressivement, les élèves se sont mis à faire les montages, et c’est aussi ce qui était attendu lors des concours, on s’en est bien aperçus, qu’ils attendaient un peu de la patte des élèves. C’est vrai que ça fait souvent des montages un petit peu moins lisses, mais des fois aussi très intéressants sur la façon de monter.
Quel logiciel utilisez-vous?
On utilise KineMaster, qu’on peut utiliser sur les tablettes et sur les téléphones, très facile d’usage. On a la version payante pour éviter d’avoir le logo KineMaster à la fin. Ça nous permet aussi de télécharger plein d’effets, plein de sons.
Comment avez-vous appris le montage?
Moi j’ai appris quand j’étais étudiant, parce qu’on faisait des vidéos pour les anniversaires des amis, ce genre de choses, donc il est resté quelques connaissances. Et après, quand on s’est lancés avec M. Kechaou, on essayait de faire les mêmes effets visuels que ce qu’on voyait. Certains élèves ont déjà des compétences. Les autres, parfois on s’installe avec eux, et on leur apprend étape par étape.
Qui valide les reportages à la fin?
On les regarde avec le groupe, et il y a toujours un enseignant qui contrôle. Après, il y a le directeur de publication qui regarde, qui est notre principal.
Pour faire une vidéo de trois-quatre minutes, combien de temps mettent les élèves?
Pour avoir une vidéo qui arrive sur YouTube telle que vous la voyez sur notre chaîne, ça prend environ 4-5 séances, plus une heure de montage environ. Ça fait du temps, mais comme il y a plusieurs groupes, ça fait pas mal de vidéos. Les élèves, à la fin de l’année, ils ont bossé sur trois reportages chacun et ça nous fait environ une trentaine de vidéos.
Pourquoi YouTube pour héberger les vidéos?
C’était à ce moment-là la plateforme qui connaissait un grand essor, elle est toujours très très suivie même si on s’est posé la question à un moment de passer sur TikTok ou sur d’autres réseaux. Pour l’instant, on continue sur YouTube, notamment parce que le format des vidéos nous semble un peu plus court sur TikTok que sur Youtube.
Qu’est-ce qui vous motive dans ce projet? Pourquoi vous y être investi?
Il y avait de l’intérêt personnel, parce que l’actualité, c’est quelque chose que j’aime beaucoup. Le mode de fonctionnement des élèves aussi m'intéressait, parce qu’on voit qu’il y a des élèves qui ont énormément de difficultés, et qui progressent de façon différente, parce qu’on leur demande par exemple de retenir des phrases pour les prononcer sans lire. Ils butent beaucoup au début, ils n'ont pas beaucoup de confiance en eux, et ils ont une évolution très positive, au niveau scolaire ça les aide beaucoup, ça se ressent. Il y avait un côté pédagogique très intéressant. On a des élèves très timides, comme ils ont un rôle, ils arrivent plus facilement à dépasser leurs limites.
Ils incluent ces vidéos dans leur parcours citoyen par exemple?
Ils peuvent le faire et ça peut compter à l’oral du brevet qui est sur 100. Ça peut être une démarche plutôt valorisante pour eux.
Est-ce que vous ressentez les bénéfices de ces victoires au concours Médiatiks?
Le concours, c’est pas ça qui motive le plus les élèves. Ce qui les motive le plus, c’est le nombre de vues sur les vidéos, le nombre d’abonnés qui grimpe, ça ça les motive pas mal. Quand ils ont sorti une vidéo, on les voit chaque semaine contrôler le nombre de vues, ils sont super contents.
Quand ils produisent des vidéos, ils savent que c’est pour YouTube. Comment le medium influence-t-il leur travail?
Les élèves, ils ont une envie d’être vus, un peu de correspondre à ce qu’ils voient sur les réseaux sociaux, c’est-à-dire d’être un peu comme un influenceur qui va avoir beaucoup de vues, ils cherchent un peu une petite reconnaissance derrière ça, mais sinon il y a aussi le boulot de journaliste qui les intéresse beaucoup, ou nos petits commentaires auxquels ils sont très sensibles. Donc quand on va les critiquer, même si des fois on n’est pas tendres, ils comprennent ça très bien et ils réagissent toujours de manière excellente.
Un conseil simple à donner à un prof qui voudrait se lancer dans la WebTV?
C’est juste d’avoir l’envie et d’avoir une petite méthodologie. Nous, pour nos reportages, on a un petit acronyme, les 3QOCP, ce qui veut dire Qui, Quand, Quoi, Où, Comment et Pourquoi : chaque reportage doit avoir la réponse à ces questions, et ensuite il y a l’angle d'attaque. On prend souvent l'exemple de Ronaldo, pour leur faire comprendre : Ronaldo, on peut le traiter de manières différentes. Par exemple, est-ce que c’est une personne bienfaitrice qui œuvre beaucoup pour les associations, ou alors est-ce que c’est un très bon joueur de foot ? On leur dit jamais qu’il faut faire un exposé total genre Wikipédia, où il faut tout traiter. Il faut toujours avoir un petit angle d’attaque. Et après, pour les reportages, il ne faut pas viser une trop longue durée, c’est toujours une petite durée, trois-quatre minutes à chaque fois. Au final, c’est toujours assez court, et donc le temps de travail pour l'enseignant n'est pas si grand, il ne faut pas paniquer. Et après, on ne force pas d’élèves, ils sont tous volontaires, tous inscrits. Il y en a parfois en cours d’année qui partent, mais on ne les retient pas.
Propos recueillis par Maud Moussy le 8 février 2022